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pirms 3 gadiem
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  1. title: « Le manoir de verre » : comment la tech traite-t-elle les femmes développeuses ou data scientists ?
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  4. <p>L&rsquo;entr&eacute;e dans le monde de la tech s&rsquo;ouvre de plus en plus aux femmes. Mais quid de la suite&#8239;? Comment sont-elles consid&eacute;r&eacute;es &nbsp;lorsqu&rsquo;elles sont effectivement devenues d&eacute;veloppeuses ou data scientists&#8239;? Quels dispositifs peuvent &ecirc;tre imagin&eacute;s pour les aider &agrave; rester dans ce milieu alors que les femmes ont significativement plus de risques d&rsquo;abandonner leur carri&egrave;re technique que leurs homologues masculins&#8239;?&nbsp;</p><p>Elisabeth Fainstein, Coach D&eacute;veloppeuse pour l<strong>e </strong>programme Entrepreneurs d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t g&eacute;n&eacute;ral et fondatrice d&rsquo;<a target="_blank" href="http://electronictales.io/">electronictales.io </a>fait le tour de quelques initiatives &eacute;mergentes &ndash; du monde associatif aux grands groupes, en passant par les start-ups et le secteur public &ndash;, afin d&rsquo;examiner les effets de celles-ci et de r&ecirc;ver aux solutions de demain.</p>
  5. <p><i>Disclaimer </i>: Je n&rsquo;aime pas parler de choses que je ne connais pas. L&rsquo;&eacute;criture d&rsquo;une tribune est donc pour moi un exercice particuli&egrave;rement difficile, car il ne s&rsquo;agit pas d&rsquo;un essai&#8239;; tout n&rsquo;a pas vocation &agrave; &ecirc;tre &eacute;tay&eacute; avec la rigueur d&rsquo;une publication scientifique. Une tribune &eacute;tant n&eacute;cessairement arbitraire, je vais donc me pr&ecirc;ter &agrave; l&rsquo;exercice de donner mon point de vue, en m&rsquo;appuyant sur des faits v&eacute;cus personnellement, des histoires relat&eacute;es par mon entourage, des choses lues et vues &ccedil;a et l&agrave; dans les communaut&eacute;s que je fr&eacute;quente. Comme vous le verrez, je me concentrerai en particulier sur les femmes devenues techniciennes du num&eacute;rique suite &agrave; une reconversion professionnelle. Non que les autres ne m&rsquo;int&eacute;ressent pas, au contraire&#8239;; mais les asp&eacute;rit&eacute;s de leurs parcours captent mieux certaines lumi&egrave;res.</p><p>De m&ecirc;me, il me semble important de pr&eacute;ciser que je n&rsquo;&eacute;nonce rien de particuli&egrave;rement neuf &ndash; les sujets que j&rsquo;&eacute;voque ont tous &eacute;t&eacute; plus ou moins largement &eacute;tudi&eacute;s et th&eacute;oris&eacute;s par des d&eacute;partements entiers d&rsquo;individus nettement plus dipl&ocirc;m&eacute;s que moi.</p><p>Enfin, il est possible &ndash; et normal &ndash; que des lecteurs soient en d&eacute;saccord avec &agrave; peu pr&egrave;s tous les points que j&rsquo;&eacute;nonce, des fondamentaux aux d&eacute;tails&nbsp;: qu&rsquo;est-ce qu&rsquo;une &laquo;&nbsp;femme&nbsp;&raquo;, qu&rsquo;est-ce qu&rsquo;&laquo;&nbsp;une femme dans la tech&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;qu&rsquo;est-ce que la Tech&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;qu&rsquo;est-ce que le juniorat&nbsp;&raquo;, et ainsi de suite&hellip;</p><p>Pour r&eacute;pondre &agrave; cela, je citerais Theodore Bikel parlant d&rsquo;un tout autre sujet&nbsp;: &laquo;&nbsp;<i>I sing Jewish songs not because they are better than the songs of my neighbour. I sing them because they&rsquo;re mine. And unless I sing them, that part of the culture will vanish and that wonderful meadow of proliferating flowers, with a profusion of flowers, will have the Jewish flower missing. That&rsquo;s why I sing Jewish songs&nbsp;&raquo;</i>.</p>
  6. <p>O&ugrave; sont les femmes&#8239;? Dans le monde la Tech, et plus particuli&egrave;rement celui de la programmation, un ensemble d&rsquo;&eacute;tudes tourn&eacute;es vers le pass&eacute; semble avoir &ndash; en partie &ndash; r&eacute;solu la question. En r&eacute;sum&eacute;&nbsp;: oui, les femmes des pays occidentaux ont &eacute;t&eacute; fortement impliqu&eacute;es dans le domaine de l&rsquo;informatique jusqu&rsquo;au milieu des 1980, puis s&rsquo;en sont d&eacute;tourn&eacute;es de mani&egrave;re drastique. Les raisons&#8239;? Si elles s&rsquo;articulent sans doute en un faisceau complexe, deux peuvent &ecirc;tre mises en avant. D&rsquo;une part, la mont&eacute;e en prestige de l&rsquo;informatique et ses possibilit&eacute;s de carri&egrave;res ont attir&eacute; davantage d&rsquo;hommes (une dynamique qui n&rsquo;est pas sans rappeler l&rsquo;histoire du cin&eacute;ma). D&rsquo;autre part, &agrave; partir de la fin des ann&eacute;es 1970, l&rsquo;ordinateur personnel arrive dans les foyers, et il est largement market&eacute; comme destin&eacute; aux gar&ccedil;ons.</p><p>Des ann&eacute;es de pratique amatrice plus tard, ces jeunes gens se sont plus facilement dirig&eacute;s vers l&rsquo;informatique pour leurs &eacute;tudes sup&eacute;rieures. Sur les bancs de l&rsquo;universit&eacute;, la diff&eacute;rence d&rsquo;exp&eacute;rience semble avoir &eacute;t&eacute; d&eacute;terminante&nbsp;: les femmes, qui, elles, n&rsquo;avaient en majorit&eacute; pas grandi avec un ordinateur personnel, se sont retrouv&eacute;es en difficult&eacute; face &agrave; leurs homologues masculins. Un premier obstacle, donc, sorte de seuil de verre fait de retard culturel et technique qui en a d&eacute;courag&eacute; plus d&rsquo;une. De 1984 &agrave; 2010, le pourcentage de femmes faisant des &eacute;tudes d&rsquo;informatique n&rsquo;a fait que chuter.</p>
  7. <p>La popularisation, ces dix derni&egrave;res ann&eacute;es, des bootcamps et autres formations courtes, est-elle en train de contribuer &agrave; inverser la tendance&#8239;? Des promotions 100 % f&eacute;minines de Simplon &agrave; Ada Tech School (qui vient de lever 3 millions d&rsquo;euros) en passant par des financements publics, de nombreuses initiatives visant &agrave; faire entrer davantage de femmes dans la Tech fleurissent. Gr&acirc;ce &agrave; ces nouvelles dynamiques, de plus en plus de femmes semblent retrouver le chemin des formations informatiques. La seuil de verre s&rsquo;&eacute;largit&hellip;</p><p>Mais qu&rsquo;arrive-t-il une fois ce seuil de verre de la formation franchi&#8239;? Comment la Tech traite-t-elle les femmes lorsque celles-ci sont effectivement devenues des techniciennes du num&eacute;rique &ndash; d&eacute;veloppeuses (notons qu&rsquo;ici, mon &eacute;diteur de texte me signale une erreur et me sugg&egrave;re &laquo;&nbsp;d&eacute;veloppeurs&nbsp;&raquo;), administratrices r&eacute;seaux, data engineers ou data scientists&#8239;? Statistiquement, ces femmes ont deux fois plus de chances de quitter le monde de la Tech que leurs homologues masculins.</p><p>Pour tenter de comprendre pourquoi, entrons avec elles dans le manoir de verre de la Tech.</p>
  8. <p>Apr&egrave;s la formation vient le temps d&rsquo;int&eacute;grer une entreprise, et le parcours vitrifi&eacute; continue. &Agrave; ce stade, le v&eacute;ritable probl&egrave;me des techniciennes du num&eacute;rique n&rsquo;est pas n&eacute;cessairement, &agrave; mon sens, d&rsquo;&ecirc;tre une femme, mais plut&ocirc;t d&rsquo;<i>avoir &eacute;t&eacute;</i> une femme jusqu&rsquo;&agrave; ce moment pr&eacute;cis. Revenons un instant aux ordinateurs personnels et aux gar&ccedil;ons qui, ayant grandi, se dirigent vers des &eacute;tudes d&rsquo;informatique. Lorsqu&rsquo;ils arrivent sur le march&eacute; du travail, ces derniers ont g&eacute;n&eacute;ralement derri&egrave;re eux trois &agrave; cinq ans de formation sp&eacute;cialis&eacute;e, ainsi que plusieurs exp&eacute;riences techniques, aussi bien professionnelles qu&rsquo;extra-professionnelles.&nbsp;</p><p>De l&rsquo;autre c&ocirc;t&eacute; de l&rsquo;&eacute;chiquier des juniors, les reconvertis, souvent pass&eacute;s par une formation courte de type bootcamp. Quel est le bagage de ces derniers&#8239;? Une premi&egrave;re carri&egrave;re dans un autre domaine et trois &agrave; douze mois de formation informatique acc&eacute;l&eacute;r&eacute;e, tr&egrave;s souvent ax&eacute;e sur des aspects imm&eacute;diatement applicables du d&eacute;veloppement web. En d&rsquo;autres termes, un bagage r&eacute;duit en algorithmie, en hardware ou encore en syst&egrave;mes et r&eacute;seaux. Pour les raisons sociologiques, &eacute;conomiques et culturelles &eacute;voqu&eacute;es en introduction, une grande partie des nouvelles techniciennes du num&eacute;rique se retrouve dans la deuxi&egrave;me cat&eacute;gorie. Elles souffrent alors d&rsquo;un probl&egrave;me qui d&eacute;passe la question de genre&nbsp;: le &laquo;&nbsp;manque de technicit&eacute;&nbsp;&raquo; des reconvertis.</p><p>S&rsquo;il fallait r&eacute;sumer grossi&egrave;rement le recrutement tel qu&rsquo;il est pratiqu&eacute; aujourd&rsquo;hui dans la majorit&eacute; des entreprises de la Tech, trois grandes modalit&eacute;s pourraient &ecirc;tre identifi&eacute;es&nbsp;:</p><ul><li>Le recrutement fond&eacute; sur l&rsquo;analyse des CV&nbsp;: &agrave; moins d&rsquo;une volont&eacute; claire, les profils issus de la m&ecirc;me &eacute;cole (ou d&rsquo;une &eacute;cole de r&eacute;putation &eacute;gale) que les fondateurs ou la majorit&eacute; des employ&eacute;s ont toutes les chances d&rsquo;&ecirc;tre privil&eacute;gi&eacute;s.</li><li>Le recrutement fond&eacute; sur une batterie de tests, souvent sur des sujets fondamentaux tels que l&rsquo;algorithmique et le design des syst&egrave;mes&nbsp;: pour les r&eacute;ussir, il n&rsquo;est pas rare que les candidats qui ne sont pas issus d&rsquo;une formation informatique traditionnelle doivent y consacrer un temps d&rsquo;apprentissage cons&eacute;quent, qui dure parfois plusieurs mois.</li><li>Un test technique &agrave; faire &agrave; la maison&nbsp;: pour le r&eacute;ussir, les candidats doivent parfois y consacrer jusqu&rsquo;&agrave; une semaine de travail &agrave; temps plein.</li></ul><p>Dans ces conditions, qui a le plus de chances d&rsquo;&ecirc;tre recrut&eacute;&#8239;? Les personnes ayant suivi un parcours d&rsquo;&eacute;tudes informatiques classique (voire d&rsquo;excellence), c&rsquo;est-&agrave;-dire une vaste majorit&eacute; d&rsquo;hommes. Signes superficiels de cette dynamique profonde&nbsp;: les formulations qu&rsquo;on retrouve encore dans certaines annonces d&rsquo;emploi, o&ugrave; les entreprises disent rechercher &laquo;&nbsp;un ninja du code&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;un h&eacute;ros du dev&nbsp;&raquo;, et autres tournures martiales.</p><p>L&agrave; encore, les femmes, parce qu&rsquo;elles sont plus souvent issues de parcours de reconversion que de formations classiques, sont confront&eacute;es &agrave; un obstacle, donc&nbsp;: la porte de verre de l&rsquo;entr&eacute;e en entreprise. Mais comme pour la formation, les choses bougent&nbsp;: des entreprises font le choix d&eacute;lib&eacute;r&eacute; de pratiquer une forme de discrimination positive dans leurs recrutements pour s&rsquo;ouvrir &agrave; la diversit&eacute;, ce qui favorise, entre autres, les femmes (et peut-&ecirc;tre <i>surtout </i>les femmes plut&ocirc;t blanches, plut&ocirc;t jeunes et plut&ocirc;t CSP+ d&rsquo;ailleurs&#8239;; mais l&agrave; encore les &eacute;tudes manquent). Les annonces d&rsquo;emploi en sont une nouvelle fois des t&eacute;moins criants&nbsp;: &eacute;criture inclusive et pr&eacute;cisions bienveillantes telles que<i> &laquo;&nbsp;vous n&rsquo;avez pas &agrave; remplir tous les crit&egrave;res pour postuler&nbsp;&raquo; </i>fleurissent.</p><p>Les raisons de cette ouverture &agrave; la diversit&eacute; sont multiples&nbsp;: meilleures prises de d&eacute;cisions, meilleures performances financi&egrave;res, meilleure image de marque&hellip; Cependant, il est int&eacute;ressant de noter qu&rsquo;au sein m&ecirc;me de ces recrutements &laquo;&nbsp;inclusifs&nbsp;&raquo;, des biais peuvent exister. Et que ces biais suivent souvent les m&ecirc;mes motifs&nbsp;: une femme communiquerait bien, garantirait une bonne relation avec les clients, apaiserait les dynamiques d&rsquo;&eacute;quipe&hellip; Elle serait aussi organis&eacute;e, appliqu&eacute;e et aurait une sensibilit&eacute; inn&eacute;e pour l&rsquo;exp&eacute;rience utilisateur et le d&eacute;veloppement frontend.&nbsp;</p><p>M&ecirc;me dans des entreprises &eacute;loign&eacute;es des enjeux de la hype li&eacute;e au fait d&rsquo;avoir une femme dans l&rsquo;&eacute;quipe technique, par exemple dans certaines entreprises de services num&eacute;riques historiques, ces pr&eacute;jug&eacute;s peuvent, de facto, constituer des avantages concurrentiels pour les femmes. Sur ce sujet, les &eacute;tudes manquent, mais il serait int&eacute;ressant de voir si, &agrave; niveaux techniques &eacute;gaux (et tr&egrave;s juniors), une femme ne serait pas favoris&eacute;e par rapport &agrave; un homme.</p><p>L&rsquo;entr&eacute;e dans une entreprise tech est aussi l&rsquo;occasion d&rsquo;entendre pour la premi&egrave;re fois une ritournelle destin&eacute;e &agrave; &ecirc;tre sans cesse rejou&eacute;e au long de la carri&egrave;re d&rsquo;un&middot;e technicien&middot;ne du num&eacute;rique&nbsp;: celle de la n&eacute;gociation salariale. Des expert&middot;e&middot;s ont couvert ce sujet, je ne ferai donc que r&eacute;sumer grossi&egrave;rement les choses&nbsp;: pour un ensemble de raisons largement ind&eacute;pendantes de leur volont&eacute;, les femmes n&eacute;gocient leurs r&eacute;mun&eacute;ration de fa&ccedil;on moins offensive que leurs homologues masculins, voire ne n&eacute;gocient pas du tout. Ce constat d&eacute;passe le domaine de la Tech, mais il est int&eacute;ressant de le revoir &agrave; la lumi&egrave;re de la bonne sant&eacute; du march&eacute; du travail, o&ugrave; il n&rsquo;est pas rare que les candidat.e.s soient en position de force &ndash; et donc en position de n&eacute;gocier &ndash; par rapport aux entreprises recruteuses. (Soit dit en passant, il serait passionnant qu&rsquo;une &eacute;tude se penche sur les salaires offerts aux femmes par les entreprises cherchant &agrave; atteindre davantage d&rsquo;inclusion.)</p><p>En d&rsquo;autres mots, d&egrave;s le d&eacute;part, les techniciennes qui parviennent &agrave; passer la porte de verre de l&rsquo;entreprise ont des chances de se retrouver une marche en dessous par rapport &agrave; leurs homologues masculins.</p>
  9. <p>En entreprise &ndash; mais cela marche aussi au sein de communaut&eacute;s techniques non-professionnelles -, le parcours de vie et d&rsquo;&eacute;tudes de certaines techniciennes peut encore placer celles-ci dans une situation inconfortable par rapport &agrave; leurs coll&egrave;gues issu&middot;e&middot;s de formations informatiques traditionnelles. Imaginez&nbsp;: vous venez de finir de corriger un bug&#8239;; contente de vous, vous allez prendre un caf&eacute; bien m&eacute;rit&eacute;. Quelques coll&egrave;gues bavardent gaiement autour de la machine. Vous vous approchez, et l&agrave;, horreur&nbsp;: il est question d&rsquo;AMD Ryzen 5 3600 <i>versus </i>Intel Core i3&ndash;10105F @ 3.70 GHz, du traumatisme vid&eacute;oludique qu&rsquo;est <i>Dark Souls</i> ou encore des diverses fa&ccedil;ons d&rsquo;overclocker un Raspberry Pi sans le faire fondre. Le mur de verre de la <i>computer culture</i> que vous n&rsquo;avez jamais eu l&rsquo;opportunit&eacute; d&rsquo;acqu&eacute;rir dans votre prime jeunesse vous coupe de vos camarades. Bien s&ucirc;r, les informaticiens sortis d&rsquo;&eacute;coles d&rsquo;ing&eacute;nieur ne parlent pas de ce genre de choses &agrave; chaque fois qu&rsquo;ils vont boire un caf&eacute;. Mais lorsque cela arrive, croyez-moi, beaucoup de personnes qui les entendent et qui ne ma&icirc;trisent pas ces sujets peuvent &eacute;prouver un sentiment d&rsquo;imposture aux effets bien r&eacute;els &ndash; et peut-on vraiment leur jeter la pierre&#8239;?</p>
  10. <p>Je parlais, plus haut, du potentiel avantage d&rsquo;&ecirc;tre une femme pour le recrutement. Maintenant que nos techniciennes sont bien pos&eacute;es sur leur premi&egrave;re marche, permettez-moi d&rsquo;y revenir pour montrer en quoi il peut &ecirc;tre compar&eacute; &agrave; un cadeau empoisonn&eacute; &ndash; ou plut&ocirc;t &agrave; de la glue qui les collerait &agrave; cet &eacute;chelon de l&rsquo;entreprise. <i>Glue work </i>&ndash; c&rsquo;est pr&eacute;cis&eacute;ment sous ce terme apparu assez r&eacute;cemment que sont regroup&eacute;es les t&acirc;ches non-techniques que peut avoir &agrave; faire un d&eacute;veloppeur ou une d&eacute;veloppeuse&nbsp;: organiser des rendez-vous, r&eacute;aliser l&rsquo;onboarding des juniors, contacter les utilisateurs&hellip; Sans grande surprise, les femmes de la Tech se reconnaissent davantage dans cette description que les hommes. Pourquoi&#8239;?</p><p>Les techniciennes du num&eacute;rique, pour toutes les raisons que nous avons d&eacute;j&agrave; vues et probablement pour bien d&rsquo;autres encore, ont moins confiance en leurs comp&eacute;tences techniques que leurs coll&egrave;gues hommes&#8239;; elles ont donc tendance &agrave; compenser en investissant la sph&egrave;re du glue work. Ce faisant, elles renforcent aupr&egrave;s de leurs managers les st&eacute;r&eacute;otypes li&eacute;s &agrave; leur genre, confirmant le &ldquo;bon&rdquo; recrutement f&eacute;minin de l&rsquo;entreprise. Et le cercle vicieux commence. Plus la technicienne pratiquera bien ce glue work, plus elle &eacute;copera de t&acirc;ches non-techniques&#8239;; puis elle traitera ce type de t&acirc;ches, moins elle aura de temps pour faire de la technique.</p><p>&Agrave; court terme, cette dynamique diminuera ses chances de s&rsquo;am&eacute;liorer techniquement. &Agrave; moyen et long terme, elle l&rsquo;emp&ecirc;chera de produire des &eacute;l&eacute;ments valorisables pour la suite de sa carri&egrave;re, la faisant doucement d&eacute;river &ndash; tant aux yeux de ses sup&eacute;rieurs que, parfois, aux siens &ndash; vers des postes para-techniques&nbsp;: engineering manager, product owner, chef de projet&hellip; L&agrave;, elles peuvent se confronter &agrave; une seconde forme de mur de verre&nbsp;: certes, elles restent dans le m&ecirc;me open space que leurs coll&egrave;gues masculins, mais elles ne parviennent pas (ou plus) &agrave; occuper les fonctions de ces derniers.</p>
  11. <p>Seuil, porte, murs&hellip; La liste des obstacles cristallins ne s&rsquo;arr&ecirc;te pas l&agrave;, au contraire&#8239;; des concepts aussi essentiels que le plafond de verre ou son pendant plus aventureux r&eacute;cemment th&eacute;oris&eacute;, la falaise de verre, permettent d&rsquo;&eacute;clairer un constat univoque&nbsp;: les femmes ont deux fois plus de chances d&rsquo;abandonner leur carri&egrave;re technique que les hommes. Alors, quelles mesures pourraient &ecirc;tre prises pour permettre aux techniciennes de rester dans notre &eacute;cosyst&egrave;me&#8239;?</p><p>Sur le grand &eacute;chiquier des domaines professionnels, la Tech a un statut particulier. Peut-&ecirc;tre plus qu&rsquo;ailleurs, il y r&egrave;gne une culture cr&eacute;ative, o&ugrave; les pratiques se r&eacute;inventent sans cesse et peuvent &ecirc;tre questionn&eacute;es dans un foisonnement d&rsquo;initiatives. La Tech, &agrave; l&rsquo;image de son &eacute;tendard le plus visible, le Web, est aussi une grande exp&eacute;rience collective men&eacute;e &agrave; &eacute;chelle mondiale. Et comme l&rsquo;a dit une des ses figures tut&eacute;laires, Albus Dumbledore&nbsp;: &laquo;&nbsp;It is our choices [&hellip;] that show what we truly are, far more than our abilities.&nbsp;&raquo;. Oui, des actions concr&egrave;tes sont d&eacute;j&agrave; pens&eacute;es &ndash; et men&eacute;es &ndash; par nombre d&rsquo;acteurs de notre &eacute;cosyst&egrave;me pour ouvrir celui-ci &agrave; davantage de diversit&eacute;. Mais il s&rsquo;agit aujourd&rsquo;hui d&rsquo;aller plus loin&nbsp;: les efforts li&eacute;s &agrave; l&rsquo;inclusion ne peuvent pas s&rsquo;arr&ecirc;ter &agrave; des efforts de formation et de recrutement&#8239;; ils doivent remonter la colonne vert&eacute;brale de l&rsquo;entreprise pour accompagner les techniciennes tout au long de leur carri&egrave;re.</p>
  12. <p>Anecdote v&eacute;cue&nbsp;: j&rsquo;ai d&eacute;j&agrave; entendu un commercial d&eacute;crire une &eacute;cole de d&eacute;veloppement web &agrave; un collaborateur potentiel en disant que c&rsquo;&eacute;tait <i>&laquo;&nbsp;une bo&icirc;te avec une majorit&eacute; de femmes&nbsp;&raquo;</i>. L&rsquo;assertion m&rsquo;avait interpell&eacute;e&nbsp;: oui, il y avait en effet beaucoup de responsables de communication, de cheffes de projets, de charg&eacute;es d&rsquo;affaires et autres professions ne relevant pas de la technique num&eacute;rique. En revanche, il y avait exactement deux formatrices en d&eacute;veloppement web dans une &eacute;quipe d&rsquo;une trentaine d&rsquo;enseignants, et aucune femme dans l&rsquo;&eacute;quipe de d&eacute;veloppement technique. Par la suite, j&rsquo;allais revivre cet &eacute;tonnement dans plusieurs autres structures&nbsp;: l&rsquo;arbre d&rsquo;une pr&eacute;sence f&eacute;minine g&eacute;n&eacute;rale semble cacher la for&ecirc;t de l&rsquo;absence de femmes &agrave; des postes techniques.</p><p>Bien que cela puisse para&icirc;tre &eacute;vident, il semble donc indispensable de commencer son chemin vers plus d&rsquo;inclusion en mesurant pr&eacute;cis&eacute;ment, au sein de ses &eacute;quipes, la r&eacute;elle proportion genr&eacute;e des individus en fonction du type de t&acirc;ches qu&rsquo;ils accomplissent. De ce comptage, on constatera peut-&ecirc;tre que ressort un d&eacute;s&eacute;quilibre montrant que, si une parit&eacute; de fa&ccedil;ade est souvent respect&eacute;e, les femmes demeurent majoritairement pr&eacute;sentes &agrave; certains types de postes et les hommes dans d&rsquo;autres.&nbsp;</p><p>Cette mesure honn&ecirc;te est le premier pas &agrave; faire pour initier un d&eacute;samor&ccedil;age r&eacute;el de la distribution genr&eacute;e des m&eacute;tiers au sein d&rsquo;une entreprise de la Tech. Elle nous r&eacute;v&egrave;le &eacute;galement que la notion de parit&eacute;, inscrite dans les textes de loi et dont les entreprises tirent souvent une grande fiert&eacute;, ne suffit pas &agrave; freiner le ph&eacute;nom&egrave;ne des in&eacute;galit&eacute;s de genre dans le milieu professionnel. La mesure honn&ecirc;te d&eacute;montre ainsi que la parit&eacute; est devenue une notion &ldquo;has been&rdquo;, et constitue seulement une premi&egrave;re pierre d&rsquo;achoppement &agrave; la mise en &oelig;uvre d&rsquo;un v&eacute;ritable effort de mixit&eacute; et d&rsquo;inclusion au sein de ses &eacute;quipes.&nbsp;</p><p>On peut voir dans ce rebond conceptuel (de la parit&eacute; vers la mixit&eacute;) des applications pratiques imm&eacute;diates&nbsp;: la r&eacute;elle mise en place d&rsquo;une politique inclusive au sein d&rsquo;une entreprise pourrait par exemple consister non seulement &agrave; embaucher plus de femmes &agrave; des postes traditionnellement occup&eacute;s par une majorit&eacute; d&rsquo;hommes, mais aussi &agrave; recruter plus d&rsquo;hommes &agrave; des postes traditionnellement occup&eacute;s par une majorit&eacute; de femmes, comme les postes de secr&eacute;tariat, de community manager ou encore de charg&eacute;&middot;e&middot;s de communication.</p>
  13. <p>Si vous avez d&eacute;j&agrave; eu l&rsquo;insouciance de reposer un livre de biblioth&egrave;que loin de l&rsquo;&eacute;tag&egrave;re o&ugrave; il &eacute;tait cens&eacute; se trouver, peut-&ecirc;tre ne l&rsquo;avez vous pas remarqu&eacute;, mais il est probable que, quelque part dans le monde, un biblioth&eacute;caire en charge du catalogage est tomb&eacute; raide mort.</p><p>Sans aller plus loin dans l&rsquo;hommage douteux &ndash; puissent Peter Pan et ses f&eacute;es reposer en paix &ndash;, disons simplement que, si mesurer est indispensable, rendre les donn&eacute;es qui en r&eacute;sultent trouvables et consultables, notamment par les potentiels candidats &agrave; un poste, constitue une &eacute;tape essentielle. Une publication des donn&eacute;es de l&rsquo;entreprise qui concernerait des indicateurs de diversit&eacute;, bien s&ucirc;r, mais aussi &ndash; et c&rsquo;est probablement l&agrave; que la b&acirc;t blesse le plus &ndash; les r&eacute;mun&eacute;rations pratiqu&eacute;es dans l&rsquo;entreprise. Des initiatives allant en ce sens ont d&eacute;j&agrave; &eacute;merg&eacute;.&nbsp;</p><p>Dans le priv&eacute;, entres autres, la mutuelle Alan publie ses grilles de salaire, accessibles &agrave; tous pour les grandes lignes, et &agrave; chaque salari&eacute; dans le d&eacute;tail. Dans le public, le programme Entrepreneurs d&rsquo;Int&eacute;r&ecirc;t G&eacute;n&eacute;ral, qui permet &agrave; des talents du num&eacute;rique de rejoindre une administration lors d&rsquo;un CDD de 10 mois, propose un syst&egrave;me encore plus simple&nbsp;: 3 500 euros nets par mois pour des personnes ayant moins de cinq ans d&rsquo;exp&eacute;rience professionnelle, 4 000 euros nets pour celles et ceux qui en ont davantage. Derri&egrave;re cette clart&eacute;, un effet plus qu&rsquo;int&eacute;ressant&nbsp;: la n&eacute;gociation salariale &eacute;tant d&eacute;samorc&eacute;e, le risque de recruter des personnes &agrave; des marches diff&eacute;rentes, en fonction de leur capacit&eacute; &agrave; n&eacute;gocier, est r&eacute;duit.</p>
  14. <p>On l&rsquo;a d&eacute;j&agrave; &eacute;voqu&eacute; &agrave; plusieurs reprises&nbsp;: une partie des techniciennes de la Tech rencontrent des difficult&eacute;s qui d&eacute;passent leur statut de femmes, et qui sont celles de toute une g&eacute;n&eacute;ration de juniors arrivant sur le march&eacute; du travail. Beaucoup d&rsquo;analystes ont d&eacute;j&agrave; pr&eacute;dit que la crise du Covid-19, avec sa globalisation du travail &agrave; distance et le boom des outils y aidant, constituera un &eacute;v&eacute;nement historique majeur pour la Tech. Autre r&eacute;alit&eacute;, moins visible&nbsp;: sur un r&eacute;seau tel que Linkedin, on ne compte plus les juniors (dans leur immense majorit&eacute; issus d&rsquo;une reconversion) &agrave; la recherche d&rsquo;un premier emploi &ndash; en vain.&nbsp;</p><p>L&rsquo;&eacute;quation est simple. D&rsquo;un c&ocirc;t&eacute;, une expansion toujours grandissante des bootcamps et autres formations courtes, menant vers une saturation du pool de personnes form&eacute;es&#8239;; de l&rsquo;autre, une crise &eacute;conomique et sociale r&eacute;clamant de l&rsquo;industrie toujours plus de performance et d&rsquo;efficacit&eacute;, d&rsquo;<i>agile</i> et de <i>time-to-market</i>. Un ou une junior qui sort d&rsquo;un bootcamp, c&rsquo;est un ou une junior qu&rsquo;il faut accompagner au quotidien dans sa mont&eacute;e en comp&eacute;tences. Mais le temps de la production compresse le temps de la transmission/formation, voire l&rsquo;annihile. Les tech leads et autres seniors n&rsquo;ont pas la &ldquo;bande passante&rdquo; pour accueillir des juniors, mais les besoins de recrutement restent pr&eacute;gnants. Partant de l&agrave;, deux possibles&nbsp;: recruter des mid-level et des seniors ou, a minima, des personnes qui sortent d&rsquo;&eacute;cole d&rsquo;ing&eacute;nieur (avec sous le bras, on l&rsquo;a dit, plusieurs ann&eacute;es de formation et des stages).</p><p>Proposer des solutions pour sortir du temps de la production (ou du moins s&rsquo;en &eacute;carter) d&eacute;passe largement mes comp&eacute;tences. En revanche, je suis convaincue que la crispation actuelle autour du recrutement des juniors, si elle ne s&rsquo;arr&ecirc;te pas bient&ocirc;t, aura des impacts n&eacute;fastes dans les ann&eacute;es &agrave; venir. L&agrave; encore, le calcul n&rsquo;est pas tr&egrave;s savant&nbsp;: les seniors finiront par quitter le march&eacute; du travail, laissant vacantes des places que les juniors (qui n&rsquo;auront jamais &eacute;t&eacute; embauch&eacute;, et donc form&eacute;) n&rsquo;occuperont pas &ndash; ce qui ne fera qu&rsquo;aggraver le d&eacute;ficit de techniciens et techniciennes dans la Tech. M&ecirc;me sans partir dans des consid&eacute;rations aussi long-termistes, l&rsquo;embauche de professionnels exp&eacute;riment&eacute;s n&rsquo;est pas sans risque&nbsp;: le march&eacute; leur &eacute;tant tr&egrave;s favorable, ils ou elles ont plus de chances de quitter pr&eacute;matur&eacute;ment l&rsquo;entreprise que des juniors bien accompagn&eacute;s par leurs coll&egrave;gues et managers. Enfin, recruter uniquement des seniors est un excellent moyen de ne jamais ouvrir ses &eacute;quipes &agrave; la diversit&eacute;, avec les cons&eacute;quences que l&rsquo;on sait.&nbsp;</p>
  15. <p>Pour diminuer ces risques, les entreprises devraient accepter de renoncer &agrave; une part de rentabilit&eacute; imm&eacute;diate au profit d&rsquo;une forme d&rsquo;investissement durable reposant sur le recrutement de davantage de juniors. En comprenant que ces juniors sortant de formations courtes &ndash; qui sont, notamment, des femmes &ndash; auraient pu &ecirc;tre ing&eacute;nieurs ou ing&eacute;nieures si ils ou elles n&rsquo;avaient pas rencontr&eacute; d&egrave;s l&rsquo;enfance toute une s&eacute;rie de barri&egrave;res socio-culturelles, l&rsquo;industrie miserait sur son propre avenir.</p><p>Mais les efforts ne devraient pas s&rsquo;arr&ecirc;ter au recrutement &ndash; auquel cas l&rsquo;&eacute;p&eacute;e de Damocl&egrave;s d&rsquo;un simple <i>diversity washing</i> pendrait toujours &agrave; proximit&eacute;. Et avec elle, deux risques. Le premier est qu&rsquo;une femme soit recrut&eacute;e pour &ecirc;tre &laquo;&nbsp;la fille de l&rsquo;&eacute;quipe&nbsp;&raquo;, consacrant une partie de son temps de travail &ndash; voire de ses loisirs &ndash; &agrave; se rendre visible et faire la publicit&eacute; de l&rsquo;entreprise (en participant &agrave; des talks, des interviews, etc.). Le second est qu&rsquo;une fois recrut&eacute;e, la technicienne ait sur ses &eacute;paules toute la charge de devoir s&rsquo;&laquo;&nbsp;imposer&nbsp;&raquo; dans son milieu professionnel.&nbsp;</p><p>&Agrave; ce titre, il est &eacute;difiant de noter que certaines femmes sont valoris&eacute;es par leurs coll&egrave;gues parce qu&rsquo;elles sont des &laquo;&nbsp;grandes gueules&nbsp;&raquo;, qu&rsquo;elles &laquo;&nbsp;ne se laissent pas faire&nbsp;&raquo;, qu&rsquo;elles &laquo;&nbsp;savent se d&eacute;fendre&nbsp;&raquo;. Se d&eacute;fendre de quoi, au juste&#8239;? De r&eacute;unions tendues, d&rsquo;open spaces aux ambiances de caserne, du sentiment d&rsquo;imposture, de la pression de livraisons soutenues&hellip; Autant de probl&egrave;mes syst&eacute;miques, et non individuels &ndash; en t&eacute;moignent les statistiques, qui montrent bien que ces difficult&eacute;s ne concernent pas <i>une </i>femme dans <i>une </i>entreprise, mais une multitudes de personnes. Or, il me semble probl&eacute;matique de faire reposer sur des individus la responsabilit&eacute; de s&rsquo;opposer &agrave; des forces syst&eacute;miques, plut&ocirc;t que de chercher &agrave; modifier le syst&egrave;me en question.</p><p>Les entreprises devraient donc r&eacute;fl&eacute;chir &agrave; mettre en place un v&eacute;ritable accompagnement de ces profils une fois pass&eacute;e l&rsquo;&eacute;tape du recrutement, et ce sur des plans multiples&nbsp;: technique, bien s&ucirc;r (&agrave; travers du temps laiss&eacute; &agrave; l&rsquo;auto-formation et &agrave; la veille, du mentorat, des formations continues, etc.), mais aussi culturel et social (par exemple, en construisant des guidelines de conduite claires, en &eacute;ditant des chartes de mixit&eacute;, en repensant le temps de travail, etc.).</p>
  16. <p>Le constat que je dresse peut para&icirc;tre sans appel. Il ne l&rsquo;est pas&#8239;; tous les jours, je vois des initiatives fleurir et des changements &ecirc;tre initi&eacute;s. Un travail de longue haleine s&rsquo;amorce d&eacute;j&agrave;&nbsp;: celui de penser les impens&eacute;s, de formaliser les implicites, de faire &eacute;voluer les syst&egrave;mes. Beaucoup ont d&eacute;j&agrave; compris qu&rsquo;il ne suffit pas d&rsquo;amorcer un changement pour faire bouger les choses&#8239;; il faut aussi comprendre ce que ce changement implique sur le long terme.&nbsp;</p><p>De m&ecirc;me, des transformations telles que celles que j&rsquo;ai &eacute;voqu&eacute;es dans cette tribune ne peuvent pas &ecirc;tre isol&eacute;es. &Agrave; titre personnel, je suis persuad&eacute;e que la question des femmes dans la Tech n&rsquo;est pas une question de <i>f&eacute;minisation </i>de celle-ci&#8239;; elle la d&eacute;passe largement, car elle concerne tous les individus pouvant &ecirc;tre identifi&eacute;s &agrave; des groupes sous-repr&eacute;sent&eacute;s dans la Tech&nbsp;: personnes racis&eacute;es, issues de milieux populaires, &acirc;g&eacute;es, queer, en situation de handicap &ndash; j&rsquo;en oublie certainement beaucoup. Si la Tech a d&eacute;j&agrave; commenc&eacute; sa mue, elle devra demain, pour continuer &agrave; faire &eacute;cho au Monde de fa&ccedil;on pertinente, regarder en face les probl&egrave;mes d&rsquo;une diversit&eacute; bien plus large. Et embrasser une dynamique encore trop souvent rel&eacute;gu&eacute;e au domaine du militantisme&nbsp;: la convergence des luttes.</p>