Lorsque deux personnes ne se supportent pas — n’ont aucune envie de servir de support l’une à l’autre — doit-on tout de suite y voir un conflit de privilèges, de classes, de cultures ou d’égos ? Peut-être qu’il y a parfois « juste » un truc qui ne passe pas et il faut plutôt travailler à dégoupiller la pression sociale qui peut pousser ces deux personnes à se rencontrer. La violence me semble émaner de cette mise en proximité si elle est imposée (aussi numérique soit-elle), on réagit rarement de manière intelligente lorsqu’on est acculé·e.
Le point de rupture est ce moment où l’on renonce à un lien, on le défait ou le tranche. C’est le moment où l’on cesse de croire en quelqu’un, d’attendre quoi que ce soit de lui. Notre capacité à lui faire confiance s’est épuisée au fur et à mesure des déceptions, des mensonges, des violences ou des trahisons. Ou bien, elle s’effondre d’un coup, sous nos yeux incrédules, comme une falaise de craie. C’est le moment de la perte, cet étrange moment où l’on « perd » quelqu’un encore vivant.
Rupture(s), Claire Marin