Finalement, réveil à 6 h au bruit des casseroles des voisin·es. C’est pas plus mal car ça me permet d’admirer la pureté du ciel étoilé par -15 °C, et puis ça me laisse le temps de me faire un gruau bien chaud avant de tout plier. Je ne suis pas encore à 100% mais c’est déjà beaucoup mieux que la veille. La bactérie ou le virus concerné doit se dire que je ne suis pas un hôte rentable.
On monte dans le bus scolaire avec un peu de retard et c’est parti pour 1 heure de transport afin de rejoindre l’autre côté du réservoir, j’ai bien fait de me mettre à l’avant car ça tourne et c’est bien gelé. On se retrouve rapidement sur la glace avec nos traîneaux pour la photo de départ et hop c’est parti.
Je me retrouve dans le groupe de tête qui va à un rythme un peu fou. Je ne sais pas trop pourquoi je m’impose ça, c’est un bon moyen de voir si j’ai de la fièvre ! Avec une telle taille de groupe, j’ai surtout l’appréhension de retarder tout le monde avec un souci plus ou moins technique, je me dis qu’avec un peu d’avance ça me permettra de pallier une éventuelle défaillance. On a tou·tes nos insécurités…
Niveau équipement, il y a un peu de tout, ça va des skis de fond aux skis de randonnée avec peaux en passant par les skis-raquettes. Je suis content de mes écailles vu les conditions mais ça me fait préférer la neige, aussi je me décale vers la berge en solo, la visibilité est bonne et je ne le vois pas comme un problème de sécurité. Les températures se réchauffent et tout le monde craint que l’étendue d’eau gelée ne se transforme en un lac de sloche…
Malgré le chargement, je me surprends à pouvoir glisser de temps en temps lorsque le revêtement est bon. C’est agréable et je suis déjà en t-shirt car il doit faire autour de zéro, ressenti 12 000 °C, la réverbération est violente. J’attends stupidement la pause de midi pour mettre une protection sur ma peau. Et pour m’alimenter. Et pour bien m’hydrater. N’importe quoi.
En arrivant dans la crique dédiée au repas, c’est ambiance station de ski avec un fond de Bob Marley et le long serpent des arrivées qui se replie pour digérer. Je pense que c’est un soulagement partagé d’être dans des conditions idéales et de pouvoir profiter de cette belle journée. Les organisateurs n’ont jamais connu ça. On a avalé les sept premiers kilomètres en moins de deux heures…
Pour la seconde partie de la journée, je prends un rythme moins soutenu car je ne veux pas arriver trempé au campement et la température monte encore. J’en profite pour observer les différentes tactiques de chacun·e pour limiter le frottement/bruit, passer sur les plaques de glace, etc. Ces sept derniers kilomètres se font sur la digestion.
Le campement est dans une crique qui laisse suffisamment d’espace pour ne pas être trop les un·es sur les autres. Je fais l’erreur de choisir stratégiquement un emplacement qui pourrait être au soleil le matin au détriment de la protection au vent. Ça va s’avérer assez critique plus tard car on va se prendre de bonnes bourrasques qui me feront craindre l’envol de mon tipi. J’enneige les bords avant de me coucher pour éviter la prise au vent par en-dessous, tant pis si ça condense cette nuit, c’est la dernière dehors.
Le coucher de soleil est magnifique et je tente même un peu d’astrophotographie à l’iPhone, soyons fous. Un ragoût de bœuf était proposé pour les personnes qui ne voulaient pas être en autonomie complète. Je tente le coup et c’était bon mais je crois que je ne mange plus assez de viande pour supporter des portions d’expédition vu mon état de fatigue. Mes nouilles traditionnelles seraient probablement mieux passées. La soirée se passe plutôt bien et les températures restent agréables.
La seule frustration partagée de la journée c’est de ne pas pouvoir tester l’équipement chaud acheté pour l’occasion ! Mais bon on ne va pas chialer la bouche pleine non plus hein…