Publications relatives au tag #forêt


Les plus récentes en premier, les 3 premières sont dépliées et ensuite c’est à la demande, bonne exploration !

Conteur (2023-09-07)

Un peu de contexte. Lorsqu’on va promener et bivouaquer en forêt avec l’enfant — comme la fin de semaine dernière — on invente des histoires. C’est souvent inspiré des lectures du moment (La guerre de clans, Naruto, etc) croisées avec les éléments que l’on a sous la main (crapauds, anis gemmes de Flavigny, etc). En rentrant à la maison, on prend un moment le soir pour écrire taper tout cela mais il faut garder de la place pour les dessins d’illustration. Me voilà donc en train de chercher comment introduire un saut de page en Markdown lors de l’impression. Ou plutôt dans le rendu de Markdown par iAWriter pour être plus précis. Et il s’avère que c’est possible (cache) avec +++ !

Au passage, je découvre qu’il y a tout un tas de possibilités dans un logiciel que j’utilise depuis des années. Comme les formules (dans les tableaux) ou les métadonnées qui viennent dynamiquement remplacer des variables. Une chouette découverte après avoir utilisé récemment les templates pour uniformiser mes courriers.

Et c’est ainsi que je vous conte ce qu’il nous est arrivé en contant cette histoire. Je vous accorde que c’est un peu meta.

Un extrait de l’histoire : Sur le chemin du retour, nous nous dimes que nous allions écrire cette histoire.
Mais on aime ça le meta. (Et les typos. (Et le passé simple.))

🪦 The 100-Year Plan isn’t just about today. It’s an investment in tomorrow. Whether you’re cementing your own digital legacy or gifting 100 years of a trusted platform to a loved one, this plan is a testament to the future’s boundless potential.

The cost is $38,000. We hope people renew.

Introducing the 100-Year Plan: Secure Your Online Legacy for a Century (cache)

📜 A false sense of security persists surrounding digitized documents: because an infinite number of identical copies can be made of any original, most of us believe that our electronic files have an indefinite shelf life and unlimited retrieval opportunities. In fact, preserving the world’s online content is an increasing concern, particularly as file formats (and the hardware and software used to run them) become scarce, inaccessible, or antiquated, technologies evolve, and data decays. Without constant maintenance and management, most digital information will be lost in just a few decades. Our modern records are far from permanent.

Shining a Light on the Digital Dark Age (cache)

🔋 But there’s something else I want to suggest here, and it’s to stop thinking about time entirely. Or, at least, to stop thinking about time as something consistent. We all know that time can be stretchy or compressed—we’ve experienced hours that plodded along interminably and those that whisked by in a few breaths. We’ve had days in which we got so much done we surprised ourselves and days where we got into a staring contest with the to-do list and the to-do list didn’t blink. And we’ve also had days that left us puddled on the floor and days that left us pumped up, practically leaping out of our chairs. What differentiates these experiences isn’t the number of hours in the day but the energy we get from the work. Energy makes time.

Energy makes time (cache)

Particules (2023-06-26)

La mémoire est la source de la libération, et l’oubli est la racine de l’exil.

Ba’al Shem-Tov

On attend que les particules fines retombent pour pouvoir décoller. Si ça n’est pas un grand écart facepalm ça…


Pas vraiment d’avihonte chez les ami·es (expatrié·es). J’évite de trop y penser, je vis déjà assez reclus comme ça. Et je suis loin d’être exemplaire.


Il y a un besoin urgent à ce que je devienne ringard. Comme la cigarette, la voiture, l’avion. Un sous-groupe de ma génération doit incarner ce qu’il ne faut pas devenir.


Les Sardaukars ont en eu marre de se battre contre des Fremens et sont retournés sur Geidi Prime pour le dire. Denis Villeneuve doit se frotter les mains.


J’ai lu le Paradoxe de Fermi de Jean-Pierre Boudine ainsi que cette illustration (cache), serait-on sur la dernière marche ? Celle du grand sot.


Combien d’appareils pourraient être rendus meilleurs en enlevant des choses dedans ? Tous ? Au moins un. (cache)


J’ai failli acheter une casquette sur laquelle était inscrite :

Ce qui distingue les garçons des hommes c’est le prix de leurs jouets. (Oui, ça sonnait mieux en anglais…)

Depuis, je ris jaune.


Je me suis mis au skate pour pouvoir suivre l’enfant. Je me demande à quel point le longboard est un skate bourgeois. Je retrouve des sensations de snowboard intéressantes cela dit.


Je suis content de ne pas avoir pris mon appareil photo pour cette dernière sortie en forêt. Documenter l’apocalypse sans la rendre belle est un enjeu important.

Un soleil rouge au-dessus de la forêt embrumée par des cendres à des centaines de kilomètres plus au nord.
Ou ringard.

Apocalypse (2023-06-12)

Lorsque je reste assis ou marche dans la forêt, je ne suis pas un « sujet » en train d’observer des « objets ». En entrant dans le mandala, je suis pris dans des réseaux de communication, des maillages de relations. Que j’en sois conscient ou non, je mets en branle ces réseaux en effarouchant un cerf, en faisant sursauter un tamia ou en marchant sur une feuille verte. Il n’est pas possible d’observer le milieu en en étant dissocié.

Les réseaux exercent également une influence sur moi. Chaque inspiration introduit dans mon organisme des centaines de molécules en suspension dans l’air. Ces molécules constituent l’arôme des bois, la senteur combinée de milliers de créatures. Certains arômes sont si agréables à l’homme qu’il les a domestiqués pour en extraire des « parfums ». Un de ces parfums au moins, le jasmonate, est un signal d’alarme chimique, qui avertit les autres plantes d’un danger. Peut-être notre esthétique olfactive reflète-t-elle un désir de participer à la lutte de la nature ?

Mais les parfums sont l’exception. La plupart des molécules de la forêt court-circuitent mon odorat et se dissolvent directement dans mon sang, pénétrant dans mon corps et mon esprit sans que j’en aie conscience. Les effets de cette imprégnation chimique de notre organisme par les arômes végétaux ont été très peu étudiés. La science occidentale ne s’est pas abaissée à prendre au sérieux l’idée que la forêt, ou son absence, puisse faire partie de notre être. Pourtant les amoureux de la forêt savent très bien que les arbres influent sur notre état d’esprit. Les Japonais ont nommé cette connaissance et en ont fait une pratique, shinrin-yoku, « se baigner dans l’air de la forêt ». Il semble que le fait de participer à la communauté d’information du mandala apporte un certain bien-être dans le cœur chimique de notre organisme.

Un an dans la vie d’une forêt, David G. Haskell

La couleur du ciel de cette semaine est peut-être la nouvelle lueur du ciel en été : jaune, cendrée, atypique. Mortelle.

J’ai déjà un filtre sur mon robinet (une partie de mes conduites sont en plomb, encore courant à Montréal), est-ce qu’il va bientôt me falloir un filtre à air pour pouvoir respirer sainement ? La sélection privilégio-capitaliste est en marche.

Comment pleure-t-on (de rire ?) devant un film lorsqu’on porte un masque de ski ? Est-ce qu’un casque de Spatial Computing permettra de protéger ses yeux de la fumée ? Et si cela devenait la seule façon de voir un ciel bleu ? Peut-être que la symbiose devra faire partie de nos conditions de survie dans la fournaise que nous créons.

Nous n’avons plus le temps pour des outils numériques individualistes. Nous n’avons plus le temps. Pour paraphraser un autre escroc présidentiel :

Notre forêt brûle et nous mettons des masques.

Jour 3 (2023-03-04)

Déplier pour lire le contenu de la publication

Je me réveille à 4h45. Tout est paisible. Je me réveille à 5h15 car j’ai le visage qui touche la toile de tente. Il vient de tomber cinq centimètres en une demi-heure ! Je secoue la tente car j’ai peur pour la sonde à neige qui me sert de mat de tipi — et qui commence à courber dangereusement — ne casse alors que je suis encore dans mon duvet. Je passe les prochains quarts d’heure à faire glisser la neige très collante lorsqu’elle s’accumule avant d’oublier toute notion de grasse matinée. Le bon côté, c’est qu’il ne fait pas trop froid.

Je m’habille et je prépare mon petit déjeuner avec mon réchaud à alcool, bien à l’abri, ça tombe en continu et le retour s’annonce épique. J’ai déjà un petit rempart de neige autour de la tente. Dire que je me réjouissais la veille que le sentier ait pu geler…

Je sors quand même faire des photos en pleine tempête de neige et je suis très content de cette session. Même si les photos une fois développées sont assez frustrantes sur ce plan là, la recherche du moment me donne un grand sourire.

La rivière sous la tempête.
Il neigeait dru !

Cerise sur le gâteau, je vois des traces sur la berge opposée et je commence à les suivre en aval puis en amont, assez loin. Il est passé il y a moins de 15 minutes et c’était à 100 mètres de mon campement. Je casse le suspense tout de suite, je n’ai jamais vu l’animal mais la traque dans ces conditions idéales pour avoir l’espoir de s’approcher sans être vu ni entendu était extrêmement stimulante. À chaque ouverture sur la rivière depuis le sentier, j’imaginais ce que ça pourrait donner avec un coyote ou un ongulé au premier plan. J’ai encore ces images dans la tête :-).

Des traces dans la neige.
À une prochaine, l’animal.

Le rangement du campement sous la neige est assez complexe sans tout mouiller mais c’est un bon exercice. Par contre le retour est vraiment fastidieux car en montée avec 15 cm de poudreuse fraîche en plus ça devient difficile de traîner une luge adaptée par mes soins. Je me dis qu’il serait pertinent d’investir dans une vraie pulka…

Le traîneau sur le chemin du retour.
Le secret, c’est de faire des pauses, vraiment beaucoup de pauses !

Davantage de photos disponibles par ici.

Jour 2 (2023-03-03)

Déplier pour lire le contenu de la publication

Je me suis couché en ayant relativement chaud mais au cours de la nuit, la température est bien tombée avec le vent. Je me réveille vers 6h avec le visage plutôt frais et le trou du duvet bien gelé, je regarde la météo depuis l’intérieur de mon duvet et iels m’annoncent -15°C ressenti -20°C avec le vent. Pas pire. ERREUR.

En fait, ce duvet est tellement chaud que je ne me suis pas trop méfié mais dès l’habillage je sens qu’il fait vraiment frette. Les chaussures sont gelées et les lacets aussi, les gants en cuirs sont raides et inutilisables, ma barbe gèle instantanément, le bouchon du Thermos a gelé. Ma montre m’indique -23°C et il y a du vent. La météo canadienne disais-je. Je fais vite un feu que j’aurais un peu mieux dû préparer la veille, je mets longtemps à récupérer de la dextérité. Ne parlons pas des pieds.

Le campement avec le soleil en arrière plan.
Ô soleil, merci de ta chaleur !

La sortie du duvet est vraiment l’étape cruciale du camping hivernal. D’habitude, je commence à mettre tout ce que je peux dans le duvet pendant une quinzaine de minutes le temps de réchauffer les vêtements externes. J’aurais pu tenter de mettre une chaufferette dans chaque chaussure aussi (j’en emporte toujours deux sans jamais les utiliser !). Je fais une petite danse du réchauffement mais je sais aussi que je suis en train de louper la meilleure heure pour les photos et ça me frustre. Je tente un changement d’objectifs à mains nues et c’est une erreur… ouille le métal gelé.

Je respire un bon coup et j’accepte la situation. La priorité est de se réchauffer en bougeant tout en m’alimentant et en faisant fondre de la neige. Il est possible de faire des erreurs mais pas de les enchaîner dans ces conditions. La magie du feu et de l’eau chaude finit par faire son effet.

C’est une de ces journées fraîches de plein soleil donc la lumière est très violente. Je décide de descendre la rivière pour réchauffer mes pieds. Bon OK, pas littéralement.

La rivière Ouareau bien gelée.
Les méandres de la rivière gelée.

Le chemin est de toute beauté et j’ai vraiment du mal à capter cette ambiance. Il n’y a vraiment personne et je prends mon temps pour rester sec (vive la laine). Je découvre que l’emmental peut con·geler, qu’il faut commencer par casser des morceaux avec ses gants puis les faire fondre dans sa bouche jusqu’à être en capacité de le mâcher. #MeanwhileInCanada

Le sentier des murmures.
Une portion du sentier qui est intégralement à couvert de forêt.

De retour au campement, je décide de faire une sieste pour attendre des couleurs et lumières moins dures. C’est une stratégie plutôt payante et je remonte cette fois-ci la rivière, il fait moins froid et c’est assez agréable d’être silencieux car je n’ai plus vraiment besoin des raquettes, le sentier a gelé.

La rivière le soir.
Difficile de restituer la sensation de calme qu’il y avait alors, seulement troublée sporadiquement par un pic.

Un peu de neige est annoncée en matinée pour le lendemain. Je m’endors confiant. Haha.


Davantage de photos disponibles par ici.

Jour 1 (2023-03-02)

Déplier pour lire le contenu de la publication

Je profite de cette semaine de relâche pour aller faire un tour en forêt, dans des conditions qui s’annoncent être assez difficiles. Il faudra que je parle du manque de précision des prévisions météorologiques canadiennes à un moment.

J’arrive sur le parking après plus d’une heure de route derrière un véhicule de déneigement. La neige est bien collante et il y a déjà une quinzaine de centimètres tombée dans la matinée. Je profite des traces de raquettes d’un couple qui vient d’arriver pour ne pas trop galérer avec le traîneau mais même les skis à écailles accrochent un peu trop à mon goût. Je suis obligé de forcer dans les descentes pour avancer ! Sans compter le traîneau qui racle bien les bords du chemin et qui prend des kilos au cours de l’avancée…

Le traîneau à l’arrivée avec pas mal de neige chargée.
Ce que ça donne à l’arrivée, transporter de la neige n’a pas grand intérêt, il y en aura à l’arrivée.

Je finis par trouver un coin qui n’est pas un emplacement de camping (bien pour le bois) et qui est pas mal en retrait du sentier tracé (bien pour moi). Le gros avantage de l’hiver avec plus d’un mètre de neige, c’est que je peux vraiment sculpter mon lieu de résidence tel que je l’entends indépendamment du relief, de la végétation ou de l’humidité.

C’est parti pour une corvée de bois, en raquettes. J’en prends toujours un peu plus que de rigueur en hiver car on ne sait jamais trop ce qu’il peut se passer (blessure/immobilisation par exemple) et c’est un élément important de sécurité par ces températures.

Un feu dans un foyer surélevé.
C’est parti pour quelques heures à entretenir un feu.

Je continue de tester ce foyer surélevé en hiver. Il est lourd mais avoir un feu efficace pour faire fondre la neige et se réchauffer sans qu’il ne coule est très appréciable. À force de faire du glamping, j’en avais oublié à quel point il est fastidieux de passer son temps à produire de l’eau liquide. Je suis à 100 mètres de la rivière mais je n’ose pas m’approcher sur la glace pour aller en récupérer une casserole entière vu les conditions.

J’ai choisi d’emporter mon appareil photo et trois objectifs pour cette sortie. Alors je passe une bonne partie de l’après-midi à explorer les alentours en essayant de ne pas trop me mouiller avec toute la neige qui charge les résineux. Même si je suis crevé par le trajet, je passe de bons moments à explorer cet environnement. Je me rends compte que j’ai maintenant suffisamment confiance en moi pour prendre mon temps avant de monter le camp.

J’ai quand même tapé une bonne plateforme avec les raquettes pour lui laisser le temps de geler avant d’aménager l’espace sous mon tipi du XXIe siècle. Iels annoncent -15°C dans la nuit, je vais enfin pouvoir tester mon duvet dans les conditions qu’il mérite. Un peu inconscient de ce qui m’attend, je me couche en regardant le feu crépiter, les joies de l’hiver… j’étais aussi parti pour essayer de voir des aurores boréales mais vu la vallée encaissée dans laquelle je suis, associée à une lune bien pleine, j’ai la flemme de me relever dans la nuit. Le vent s’est levé et de la neige chute des arbres par rafales.


Davantage de photos disponibles par ici.

Jour 3 (2023-02-12)

Déplier pour lire le contenu de la publication

Réveil vers 6 h après une nuit qui a débuté venteuse mais qui a ensuite été très reposante, les muscles tirent mais c’est normal. Je sors de mon duvet sans même avoir à trop m’habiller, il doit faire -4 °C.

C’est chouette car maintenant il y a une autre synergie dans le groupe qui permet d’échanger sur des techniques, du matériel, des astuces. On a un cameraman qui s’occupe de faire des petites vidéos explicatives aussi. On plaisante sur le fait qu’il ne fallait pas s’inscrire sur un coup de tête mais que toutes les inscriptions sont parties en 24 h. Les départs se font au compte-goutte, sans pression, au gré des personnes.

Un groupe de personnes qui partent du campement en traineau sur un lac gelé.
Avec la gang de tête.

À moins de 50 mètres du campement, on croise les traces de deux canidés qui sont passés sur le réservoir dans la nuit. L’un des accompagnateurs nous indique que la visibilité des griffes pourrait signifier des loups plus que des coyotes.

De belles traces de canidés dans la neige sur la glace du lac.
Pas si seul·es au monde :-)

Il y a 5 kilomètres avant d’arriver à l’innovation de l’année : un apéro ensemble avant la toute dernière section pour rejoindre l’accueil. C’est une bonne idée car ça permet de s’échanger des photos via AirDrop, des anecdotes, de faire des plans ensemble, etc. Les conditions permettent de prendre le temps sans être agglutiné·es autour du foyer.

On évoque notamment la possibilité de faire une édition avec enfants conditionnée par la météo (et l’expérience).

Anecdote : il y a eu des bières gratuites tout au long du parcours, avec et sans alcool, car le directeur de Boréale était avec nous.

File des arrivées progressives sur le site.
Pour donner une idée du cheminement.

Difficile pour moi d’exprimer un ressenti à chaud de l’expédition, je m’y risque quand même :

Et l’année prochaine ? Pas facile de me prononcer pour l’instant, ça m’a permis d’envisager d’autres expéditions par contre.

Jour 2 (2023-02-11)

Déplier pour lire le contenu de la publication

Finalement, réveil à 6 h au bruit des casseroles des voisin·es. C’est pas plus mal car ça me permet d’admirer la pureté du ciel étoilé par -15 °C, et puis ça me laisse le temps de me faire un gruau bien chaud avant de tout plier. Je ne suis pas encore à 100% mais c’est déjà beaucoup mieux que la veille. La bactérie ou le virus concerné doit se dire que je ne suis pas un hôte rentable.

Le ciel à 7h du matin sur le réservoir du Poisson Blanc.
Les couleurs sont magnifiques et je regrette déjà de ne pas avoir pris un appareil photo.

On monte dans le bus scolaire avec un peu de retard et c’est parti pour 1 heure de transport afin de rejoindre l’autre côté du réservoir, j’ai bien fait de me mettre à l’avant car ça tourne et c’est bien gelé. On se retrouve rapidement sur la glace avec nos traîneaux pour la photo de départ et hop c’est parti.

Je me retrouve dans le groupe de tête qui va à un rythme un peu fou. Je ne sais pas trop pourquoi je m’impose ça, c’est un bon moyen de voir si j’ai de la fièvre ! Avec une telle taille de groupe, j’ai surtout l’appréhension de retarder tout le monde avec un souci plus ou moins technique, je me dis qu’avec un peu d’avance ça me permettra de pallier une éventuelle défaillance. On a tou·tes nos insécurités…

Des personnes sur le lac gelé qui tirent chacune un traineau
Le vent a bien soufflé cette nuit, on alterne glace et neige.

Niveau équipement, il y a un peu de tout, ça va des skis de fond aux skis de randonnée avec peaux en passant par les skis-raquettes. Je suis content de mes écailles vu les conditions mais ça me fait préférer la neige, aussi je me décale vers la berge en solo, la visibilité est bonne et je ne le vois pas comme un problème de sécurité. Les températures se réchauffent et tout le monde craint que l’étendue d’eau gelée ne se transforme en un lac de sloche

Une longue trainée de personnes tirant des traineaux sur le lac
Un peu à l’écart de la foule, on ne se refait pas.

Malgré le chargement, je me surprends à pouvoir glisser de temps en temps lorsque le revêtement est bon. C’est agréable et je suis déjà en t-shirt car il doit faire autour de zéro, ressenti 12 000 °C, la réverbération est violente. J’attends stupidement la pause de midi pour mettre une protection sur ma peau. Et pour m’alimenter. Et pour bien m’hydrater. N’importe quoi.

En arrivant dans la crique dédiée au repas, c’est ambiance station de ski avec un fond de Bob Marley et le long serpent des arrivées qui se replie pour digérer. Je pense que c’est un soulagement partagé d’être dans des conditions idéales et de pouvoir profiter de cette belle journée. Les organisateurs n’ont jamais connu ça. On a avalé les sept premiers kilomètres en moins de deux heures…

Pour la seconde partie de la journée, je prends un rythme moins soutenu car je ne veux pas arriver trempé au campement et la température monte encore. J’en profite pour observer les différentes tactiques de chacun·e pour limiter le frottement/bruit, passer sur les plaques de glace, etc. Ces sept derniers kilomètres se font sur la digestion.

Des personnes devant moi avec des traineaux, on voit mon ombre.
Pour ma part, c’est neige fraîche, quitte à forcer un peu plus je préfère soigner mon silence relatif.

Le campement est dans une crique qui laisse suffisamment d’espace pour ne pas être trop les un·es sur les autres. Je fais l’erreur de choisir stratégiquement un emplacement qui pourrait être au soleil le matin au détriment de la protection au vent. Ça va s’avérer assez critique plus tard car on va se prendre de bonnes bourrasques qui me feront craindre l’envol de mon tipi. J’enneige les bords avant de me coucher pour éviter la prise au vent par en-dessous, tant pis si ça condense cette nuit, c’est la dernière dehors.

Le soleil se couche derrière des blocs de glace.
Je vous épargne les différents dégradés de rose qui ont suivi !

Le coucher de soleil est magnifique et je tente même un peu d’astrophotographie à l’iPhone, soyons fous. Un ragoût de bœuf était proposé pour les personnes qui ne voulaient pas être en autonomie complète. Je tente le coup et c’était bon mais je crois que je ne mange plus assez de viande pour supporter des portions d’expédition vu mon état de fatigue. Mes nouilles traditionnelles seraient probablement mieux passées. La soirée se passe plutôt bien et les températures restent agréables.

Une tente rouge et Orion au-dessus.
C’est bruité et tout mais j’étais content que l’on distingue au moins Orion.

La seule frustration partagée de la journée c’est de ne pas pouvoir tester l’équipement chaud acheté pour l’occasion ! Mais bon on ne va pas chialer la bouche pleine non plus hein…

Jour 1 (2023-02-10)

Déplier pour lire le contenu de la publication

Ma propre inadaptation physiologique au froid a aussi son origine dans la sélection naturelle. Je ne suis pas à ma place dans ce mandala glacial car mes ancêtres ont échappé à la sélection naturelle par la résistance au froid. L’homme descend de grands singes ayant vécu pendant des dizaines de millions d’années en Afrique tropicale. Conserver sa fraîcheur était bien plus nécessaire et ardu que de conserver sa chaleur, et nous avons donc peu de défenses corporelles contre le froid. Lorsque nos ancêtres ont quitté l’Afrique pour gagner l’Europe du Nord, ils ont emporté avec eux du feu et des vêtements, transportant ainsi les tropiques dans les régions tempérées et polaires. Cette ingéniosité leur a épargné bien des souffrances et des pertes, résultats incontestablement bénéfiques. Mais le confort est une dérobade face à la sélection naturelle. Notre aptitude à faire du feu et à nous vêtir nous condamne définitivement à ne pas être à notre place dans le monde hivernal.

Un an dans la vie d’une forêt, David G. Haskell

Je me réveille avec pas mal de symptômes, je me sens malade depuis la veille et ça ne s’arrange pas… je suis dégoûté. Tout seul, j’aurais reporté mais là c’est plus compliqué, j’accompagne l’enfant à l’école et je mets un bon moment à me décider à décoller pour 3 heures de route après un bon cocktail de vitamines. Je me dis que si ça se dégrade vraiment dans l’après-midi/nuit je pourrai toujours rester au chalet d’accueil la nuit et rentrer.

J’arrive le premier, il est demandé aux participant·es de passer la première nuit sur le parking pour vérifier le matériel et les compétences, ce que je trouve justifié vu le contexte. Je monte tranquillement la tente, les conditions de voyage ont été difficiles et je n’ai qu’une hâte : la sieste !

Un parking avec un bon 70 cm de neige vierge dessus.
C’est bien la première fois que je vais camper sur un parking !

Les températures sont plutôt clémentes, les personnes arrivent au compte-goutte et je fais une étude sociologique autour du montage de tente. Il y a vraiment tous les âges, toutes les expériences, une diversité d’équipement. Et j’avais été assez mauvaise langue, il y a une parité apparente. C’est une chose qui m’avait déjà étonné lors d’un précédent stage de survie douce. Vive le Québec <3.

La réunion d’accueil à 19 h se fait sous une neige bien dense autour du foyer, c’est très jovial. Je suis content d’avoir finalement opté pour le tipi qui est efficace pour ne pas accumuler trop de poids avec la neige et qui reste ventilé pour ne pas garder la condensation et finir trempé.

Les organisateurs nous annoncent des conditions très clémentes, presque trop mais la glace est solide grâce au vortex polaire de la semaine passée. Départ prévu à 7 h 30 demain matin, il faut que le traîneau soit près à embarquer à ce moment là. Je mets le réveil à 6 h 30 et je ne fais pas long feu car je me suis encore bien diminué. Je m’endors grâce au bruit (littéralement !) blanc de la neige qui crépite sur la toile. Les réveils nocturnes permettent de faire tomber la neige des parois, la gorge gratte. J’utilise pour la première fois mon duvet -30 °C et je crève de chaud, j’apprends à utiliser ses ouvertures latérales. Je l’ai acheté en panique il y a deux semaine, après la réunion d’information qui nous racontait une nuit à -38 °C il y a 3 ans…

Jour 2 (2023-01-22)

Déplier pour lire le contenu de la publication

Deux objectifs au réveil : minuter le rangement du camp et ne pas faire de feu.

J’ai rarement l’occasion de me presser lorsque je suis en forêt. À part peut-être si je sais qu’un orage s’en vient. Or, j’ai besoin de savoir en combien de temps est-ce que je peux avoir mon traîneau de prêt car qui dit groupe dit synchronisation.

Il m’a fallu environ une heure, sans compter le petit déjeuner que je peux envisager froid/en route. J’ai des pistes d’améliorations mais ça va beaucoup dépendre des conditions aussi, notamment du vent. Ce n’est pas la même chose de devoir plier bagage et préparer son eau de la journée dans une tente ou pas !

Je voulais aussi tester le réchaud à alcool dans des conditions froides mais le pré-chauffeur n’a pas été nécessaire vu la température. En tout cas, la fait de chronométrer tout ça m’a permis de vérifier qu’il était possible de se passer de feu pour se réchauffer, j’ai fini en sueur.

L’effet de bord de cet empressement était aussi de pouvoir prendre le départ après le regel de la nuit et mettre toutes les chances de mon côté pour ne pas prendre un bain matinal.

Un ski dans les traces de la veille, sur le chemin du retour.
Le retour dans ses traces demande tellement moins d’énergie !

Le plus fastidieux reste de rapatrier tout l’équipement jusqu’à la voiture. Il est encore tôt et je décide d’aller me promener sur l’autre rive du lac, cette fois-ci en raquettes et avec un sac bien plus léger. C’est toujours agréable de se sentir voler, comme libéré du poids induit par toute cette recherche de mise en confiance.

Jour 1 (2023-01-21)

Déplier pour lire le contenu de la publication

L’objectif de cette sortie est de faire une répétition pour la sortie en groupe que je prépare. J’espérais pouvoir tester le matériel dans des conditions froides et il faisait malheureusement juste frais. À tel point que je doutais de pouvoir passer sur le lac, ce qui est (était ?) plutôt rare pour un 21 janvier…

J’arrive sur le parking avec beaucoup de matériel et de vêtements. Déjà là en me changeant, je sens bien que ça va être différent de mes autres sorties hivernales, j’arrive à le faire sans être enfermé dans la voiture ! Je fais deux portages pour arriver jusqu’au lac et j’harnache le traineau. Mon poids doit être autour de 100 kilos sur les skis, le traineau autour des 50, ça fait pas mal de poids au cm² et la glace est fine car on est sur un redoux. Je décide de longer la bordure sud car c’est celle la plus à l’ombre des arbres.

Un selfie avec le traîneau en arrière-plan, sur un lac québécois avec la forêt au fond.
Il est très rare que je fasse des égoportraits mais là j’aimais bien voir le téléphone dans les lunettes.

J’avais prévu de traverser l’intégralité du lac dans la longueur, je décide finalement de m’arrêter à mi-chemin car je flippe un peu pour ma sécurité, le soleil tape fort et même la couche de neige n’est pas si épaisse. Par chance, je décide de m’arrêter juste à un endroit qui est un emplacement de camping. J’avais aussi prévu de dormir sur le lac en mode répétition mais la terre ferme me parait quand même plus sûre vu les conditions.

Hop, passage des skis aux raquettes pour aplatir l’emplacement de la tente puis du feu. Je commence à être rôdé et je teste un nouveau foyer portable qui me permet de ne pas voir mon feu couler dans la neige. Ce premier essai est concluant même si c’est très lourd (presque un kilo). Il faudra que j’ajoute une partie sur la section dédiée.

Un feu dans un réceptacle permettant de le garder au-dessus de la neige.
J’essaye habituellement de faire des petits feux économes et efficaces, j’ai un peu forcé pour la photo…

Je passe l’après-midi et la soirée dans des conditions idéales, je suis juste frustré de ne rien avoir pris pour dessiner. Je ne pensais pas pouvoir tenir aussi longtemps les mains nues… J’en profite pour refaire les réserves d’eau chaude et liquide, vérifier la pertinence d’une partie de l’équipement et amasser plus de bois qu’il n’en faut.

À 20 heures, il fait -8°C et je n’ai même pas eu à enfiler ma dernière couche, c’est bien la première fois que je suis frustré de ne pas me geler. Je vais faire un tour sur le lac, le silence est complet, le ciel est chargé et sombre, sensation très étrange que celle de marcher dans la seule lumière disponible.