Situation


Grâce à Maud et son crayon, nous avons pu faire de la B.D. un formidable outil pour crier nos colères, témoigner des injustices, parfois avec rage ou une pointe de découragement et de tristesse mais souvent avec humour. Tantôt espace de déversement de nos colères ou échappatoire jubilatoire, cette B.D. a aussi été l’occasion pour nous de réfléchir à de potentielles voies d’émancipation, notamment collectives. Face à des situations de sexisme qui nous sautent aux yeux et nous laissent souvent impuissantes, s’esquissent désormais des scènes de B.D. qui dénoncent l’oppression.

Notre B.D., si elle se veut féministe, n’a pas pour ambition de parler au nom de toutes les femmes. Elle est le reflet des constructions sociales de ses autrices : nous sommes toutes les six des femmes jeunes, cisgenres, blanches, hétéronormées et ayant fait des études supérieures. Nous ne prétendons donc pas à l’universalité de nos propos et nous avons essayé de garder en tête cette dimension située. Comme nos personnages, nous bénéficions d’un certain nombre de privilèges. Certains conscients, d’autres sans doute moins…

Il est où le patron ?, Maud Bénézit & Les paysannes en polaire

J’aimerais pouvoir exprimer cela de manière claire sur cet espace. La difficulté d’un écrit en ligne est que l’on peut facilement tomber dessus sans avoir plus que ça de notion de temporalité ou d’évolution de l’auteur·ice. Ma façon de me situer aujourd’hui sera probablement différente de celle que j’aurais explorée demain.

Quel support pour le palimpseste d’une vie ?


Le même soir, je lis :

Ce que je veux vous faire comprendre avec cette longue présentation, c’est que nous sommes tous et toutes situé·es socialement, que nous devons composer avec un curieux mélange de privilèges et de discriminations, qui se cumulent et s’entrecroisent. Ça nous marque au fer rouge, ça modèle nos consciences et nos subjectivités, et donc nos façons d’aimer et d’être aimé·es.

Ce qui veut dire que nous ne sommes pas tout à fait libres, mais pas totalement déterminé·es non plus. Et je crois que plus on prend conscience de tout ce qui nous détermine, plus on peut être libre.

Le Cœur sur la table, Victoire Tuaillon