Parenthèse
Un séjour ailleurs, lors de congés ou d’un voyage, donne une forme géographique à la vacance de soi, une manière homéopathique de se défaire pendant des jours ou des semaines des exigences de la vie professionnelle, personnelle ou familiale. Moment de suspension des contraintes habituelles de l’identité, espace où les rôles sont redéployés avec des acteurs différents dans un contexte où tout devient possible car chacun choisit son mode d’être sans que nul ne le connaisse et puisse s’en étonner ou lui reprocher son allure ou ses comportements. Moment de parenthèse, sorte de récréation sociale ou les rôles coutumiers cessent de régir la vie quotidienne au profit d’une brève liberté de mouvement. Nul ne sais à quoi s’en tenir face à un voyageur, un marcheur, par exemple, à moins qu’il ne dévoile de lui-même des informations sur ce qu’il est, mais il peut demeurer anonyme en participant aux échanges sans donner prise à son état civil ou à son histoire personnelle ou en s’inventant un personnage.
Disparaître de soi, David Le Breton
Juin est le mois où je ressens très fortement ce besoin d’aller me perdre dans les bois sans en avoir la possilité. Enfin, quand je dis « perdre » ce serait peut-être davantage « retrouver », voire même « transformer ». Osons un « je vais me gagner dans les bois ».
Tout cela n’est que babillage sémantique, en vieillissant je crois qu’on se met encore plus à jouer avec les mots. Peut-être une façon d’oublier ses propres maux. De s’oublier. De disparaître.
Note avant publication : entre temps, Karl publie de son côté :
Se perdre en forêt est une désorientation complète. Je ne me suis jamais vraiment perdu en forêt. J’ai parfois hésité sur la direction dans laquelle marcher, ou bien rallonger mon chemin.