? Éducation et informatique

Moins les enfants regarderont les écrans, plus ils développeront leur imagination et leur créativité. Car les écrans contiennent en eux des histoires visuelles et sonores qui empêcheraient les enfants d’imaginer d’autres images et d’autres mondes possibles.

Écran global, reportage de Anne-Sophie Lévy-Chambon

Protéger son enfant des écrans s’avère être une tâche plus difficile que ce que j’imaginais. Le compteur en cumulé doit être aux alentours des 10-15 minutes après 7 mois, ce qui est plutôt dans la limite haute de ce que je m’étais fixé. Et lorsque je vois l’attrait qu’il a pour un écran dès qu’il en croise un, cela me conforte dans l’idée qu’il va falloir attendre qu’il soit en mesure de comprendre un peu ce qu’il y a derrière : une fenêtre déshumanisée sur l’Humanité.

On parle souvent de la limite des 3 ans pour qu’un enfant puisse regarder/interagir avec un écran sans être perturbé par l’absence de retour de sa part. On verra à ce moment là si mon digital native souhaite faire usage de ses doigts.

L’élève sait que les équipements informatiques utilisent une information codée et il est initié au fonctionnement, au processus et aux règles des langages informatiques ; il est capable de réaliser de petites applications utilisant des algorithmes simples.

Socle commun de connaissances, de compétences et de culture

Damien B et Éric D. discutaient ce soir de l’apprentissage du code en primaire sur Twitter. J’ai beaucoup de mal avec cette question car le code constitue une part non négligeable de mon quotidien et de mon métier. Et si je trouve que la connaissance du Web devrait faire partie de l’éducation citoyenne, je suis plus circonspect sur le développement en lui-même. En fait, il s’agit d’une problématique de cohérence. Soit on considère que le codage (sic) est une activité artisanale et dans ce cas il faudrait également enseigner d’autres activités comme le travail du bois en primaire (ce que certaines écoles alternatives font — voir le reportage sus-cité). Soit on considère que l’industrialisation de l’informatique est inévitable et dans ce cas là toute la question algorithmique simple devient inutile puisqu’il s’agira d’empiler les boîtes noires à un autre niveau. Il faut bien définir les objectifs que l’on se fixe avec cet apprentissage du code dès le primaire. Dans quelle mesure permet-il la poursuite d’études, la construction d’un avenir personnel et professionnel et préparer à l’exercice de la citoyenneté ? Tous bidouilleurs, soit, mais que nous laisse-t-on bidouiller par la suite ?

Ce que je vois en filigrane de cette mutation est plus grave, c’est la mise sur un piédestal de ceux qui savent coder par pure incompréhension du changement de paradigme qui est en train de s’effectuer avec le numérique. Ou serait-ce pour pouvoir à terme alimenter plus facilement les canons publicitaires ? La question reste ouverte… jusqu’à la prochaine réforme.

Discussion suite à l’article :

Je suis avec intérêt tes brèves, d’autant plus depuis que tu es père. Mon garçon à 3 ans et demi, et je suis passé par les mêmes réflexions.

J’ai utilisé le dessin animé beaucoup plus que ce je pouvais imaginer, car sa mère a été très longuement et fréquemment absente, et nous rompions l’isolement (on vit loin de tout) avec l’image qui bouge. Il avait 1 an et demi lorsque j’ai commencé.

On n’imagine pas la portée de cette nourriture chez un enfant. Elle se retrouve dans ses mots, ses jeux et est un révélateur de personnalité. Elle est aussi à l’instar du sucre une substance addictive.

Ce qui me marque le plus dans l’interaction avec l’ordinateur (à la maison il n’y a qu’un portable, pas de tablette, pas de télé), c’est à quel point il a intégré l’immédiateté de l’information : il est sensible à la vitesse de chargement et à la pertinence de mes actions. L’instantanéité pourrait devenir une exigence et elle est induite par l’outil.

Cela m’a poussé à étudier la question du numérique à l’école, et le sujet est très vaste. Je reste circonspect sur l’approche pédagogique de la culture informatique (tel que je la suis dans le MOOC eFan).

J’ai décidé de m’y impliquer afin que des développeurs participent au développement du numérique et non pas seulement des éditeurs d’application ou de plateformes (ENT) et des chercheurs. A titre d’information : aujourd’hui, ce que j’ai identifié de plus important est de mettre en place des outils pour les enseignants qui vont avoir besoin de beaucoup de bienveillance pour intégrer ce changement majeur (qui leur sera imposé). J’ai commencé à écrire les bases de cette réflexion. Le travail est inachevé (j’ai du mal à inclure les références), mais donne mes lignes. La première étape sera une application de plus (sur les 190 référencées dans les académies !).

Une fois ou deux par an nous essayons d’échapper à l’électricité une semaine ou deux et la force de ces moments équilibre pour l’instant l’attrait pour le portable, le téléphone et les dessins animés. Je suis convaincu que des propositions humaines fortes et la nourriture des espaces naturels permettent de relativiser l’importance des machines.

Alain Vitry, le 2014-06-24 à 03:53

De plus en plus, je me demande si à la place de la position de l’interdiction, on se replacer dans une position de l’équilibre. En consacrant autant de temps à un nombre d’activités diverses, on élargit le champ des possibles plutôt qu’en le limitant à l’une de nos obsessions. Mettons l’écran et l’informatique de côté, comment diversifier ton expérience du monde lorsque tu es fille d’ébéniste ou fils de professeur en littérature. Quelle est l’expérience du monde si tu ne vis qu’en ville et pas dans la forêt. Quelle est l’expérience si tu ne touches que des matières lisses et propres et pas la boue et l’écorce.

Karl Dubost, le 2014-09-16 à 04:56

En consacrant autant de temps à un nombre d’activités diverses, on élargit le champ des possibles plutôt qu’en le limitant à l’une de nos obsessions.

Tout à fait. Chez nous, on n’interdit pas. On limite en expliquant que ça use un peu le cerveau alors qu’il y aurait plein d’autres choses à faire. Et on fait avec eux (promenades, découverte, photo, jeux de société). Enfin, quand on a le courage ;)

Stéphane Deschamps, le 2014-09-16 à 09:10

Chez nous, on projette des dessins animés via l’écran d’ordinateur, c’est le seul usage à partir de 2 ans. Nous restons auprès des enfants, si possible sur le canapé à côté d’eux. Nous n’avons pas de TV, du coup, on passe du temps à jouer aux cubes/voiture/poupées/Lego, à dessiner, à lire des histoires, à chanter.

Je trouve cet article sur l’Express, qui continue, et je me suis permise de le coller dans le mail :

Les dirigeants de la Silicon Valley transforment le monde en un environnement totalement technologique, mais se montrent comme parents particulièrement réticents à l’égard de ces applications innovantes, écrit Nick Bilton, journaliste spécialiste de la technologie auprès du journal américain The New York Times. Bilton a en effet constaté que l’élite de la Silicon Valley contrôle de manière stricte l’utilisation de la technologie par leurs enfants.

« Le défunt Steve Jobs a admis à l’époque que ses enfants n’avaient jamais utilisé un iPad, un des grands > succès d’Apple », explique Nick Bilton. Jobs faisait également remarquer aussi que l’utilisation de la > technologie était particulièrement limitée dans sa maison.

Plus tard, il est apparu que Jobs n’était pas une exception. Dans la famille de Evan Williams, un des > fondateurs de Twitter, les enfants n’ont pas non plus de tablettes et en outre, la lecture de livres imprimés > est encouragée. Chris Anderson, ancien rédacteur en chef du magazine de technologie Wired, a même admis qu’il > ne tolérait pas d’écran d’ordinateur dans la chambre de ses enfants.

« Nous avons constaté en premier les dangers de cette technologie et je ne veux pas que mes enfants puissent > être confrontés à ces problèmes », a affirmé Anderson pour justifier ces restrictions.

Bilton dit avoir constaté que la plupart des pionniers de la technologie limitent l’utilisation de gadgets > comme les tablettes ou les smartphones par leurs enfants à 30 minutes par jour pendant la semaine, alors que > d’autres ne tolèrent l’usage de la technologie que pendant le week-end.

A partir de l’âge de dix ans, les enfants de ces pionniers peuvent, selon le journaliste, utiliser pour la > plupart un ordinateur, mais uniquement pour leurs travaux scolaires.

Hannah Rosin, journaliste auprès de The Atlantic, a constaté un phénomène similaire chez les concepteurs > d’applications pour enfants. « Là aussi, il a semblé que le divertissement numérique est tabou pendant la > semaine », dit-elle.

Les restrictions par rapport à la technologie se reflètent aussi souvent selon les observateurs dans le choix > des écoles que les entrepreneurs de Silicon Valley réservent à leurs enfants.

Beaucoup de cadres d’entreprises de Google, Yahoo, Apple et eBay semblent en effet avoir inscrit leurs > enfants à la Waldorf School dont la philosophie ne laisse aucune place à la technologie qui selon la > direction, représente une menace pour la créativité, le comportement social et la concentration des élèves.

Sarah Haim, le 2014-09-19 à 14:35