title: Spontanéité et algorithmes > Petite réflexion inspirée de la manifestation qui fait l'actualité : j'entends dire qu'une telle manifestation est spontanée, qu'elle est auto-organisée, que c'est une nouvelle ère de la possibilité de contestation et de la politique. J'entends aussi dire que des partis politiques traditionnels voudraient récupérer ce mouvement, mais qu'ils sont à la peine, comme débordés. > > Au temps des réseaux sociaux, n'oublions pas que la spontanéité dépend des timelines algorithmiques, et la contestation de ce qui est donné à voir à travers les bulles de filtres. N'oublions pas que tout ce qui permet au champ social de s'organiser est par définition politique. > > N'oublions pas que les réseaux sociaux ne sont pas neutres, mais imprégnés dès leur conception d'une idéologie spécifique qui, si elle oscille entre libertarisme et censure, a le plus souvent comme point de mire l'influence et l'exploitation des désirs de l'ego. > > Ne nous mentons pas : les réseaux sociaux sont bel et bien un parti politique qui structure toutes ces manifestations. Qu'il soit hors de portée de la perception de ceux qu'il anime est très inquiétant : déterminés par une cause qu'ils ignorent, ils sont tout sauf libres. Or, la politique de nos démocraties repose sur la liberté individuelle. > > *[Aurélien sur Mastodon](https://mastodon.social/@alatitude77/101090778330262399)* Sommes-nous encore capable de libre arbitre en étant connectés ? Sommes-nous juste capable de liberté individuelle en étant socialisés ? Serions-nous même capables de penser sans avoir été influencés ? *La réponse ne peut être que « non » ;-).* [Réponse d’Aurélien](https://mastodon.social/@alatitude77/101096480507177199) : > Quelle autre liberté que celle qui s'exprime dans un espace relationnel ? Ainsi définie, autrui n'est-il pas tout autant la condition de ma liberté que celui face auquel elle s’échoue ? Les "autruis" multiples qui, en la circonscrivant, font apparaitre le périmètre qui n'est qu'à moi ne sont-ils pas les garants de ma liberté en même temps que ses gardiens ? > > Et à quoi donc inciterait ce périmètre, cette marge de manœuvre, cette souveraineté irréductible d'un royaume isolé, cette *latitude* tragique à investir, sinon à la rencontre (Lévinas) et à l'engagement, qui n'est pas le renoncement à la liberté, mais son dépassement/accomplissement ? (cf. sphère éthique de Kierkegaard par ex.)