title: Agir en lien avec ses valeurs, est souvent vu comme du courage… et si c’était tout l’inverse
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Mardi dernier, j’animais un atelier sur le thème « comment identifier ses valeurs ». Lors d’une discussion, un participant a fait une réflexion que j’ai trouvée particulièrement éclairante :
« Agir de manière alignée avec ses valeurs est très souvent vu comme un acte de courage par les gens autour de vous, alors que c’est souvent tout l’inverse ».
« Agir de manière alignée avec ses valeurs est très souvent vu comme un acte de courage par les gens autour de vous, alors que c’est souvent tout l’inverse ». Je la répète car si vous ne deviez retenir qu’une idée de cet article c’est celle-là. Je l’illustre et j’explique mon interprétation, mais elle résume tout le message que je veux faire passer.
Je pense que cette réflexion m’a marqué car je la trouve particulièrement adaptée à ma situation: tout ce que je fais, je le propose en prix libre. C’est à dire que c’est mon interlocuteur qui choisit le montant de ma prestation. Dernièrement, beaucoup de gens me disaient que c’était osé et pourtant cela ne résonnait pas du tout pour moi.
En regardant un peu en arrière, je me rends compte que mes valeurs expliquent tout à fait pourquoi ce choix est tout sauf courageux (pour moi). J’ai notamment deux valeurs très importantes : l’honnêteté intellectuelle et la confiance.
Ma définition* de l’honnêteté intellectuelle, c’est d’une part la capacité à se remettre en question et à faire évoluer ses idées, et d’autre part le fait de ne jamais prétendre pouvoir faire quelque chose sans être sûr de pouvoir le faire et sans être convaincu que c’est pertinent. Pour la confiance, dans cette situation c’est très liée à la première valeur car je m’attache à ne surtout pas rompre la confiance qu’on m’accorde. (*je dis bien ma définition car ce que veulent dire ces valeurs pour moi et comment je les traduis en comportements est tout à fait personnel)
J’accompagne des projets à identifier leur raison d’être et les valeurs de l’équipe. J’ai commencé à le faire avec 3 projets qui sont venus me chercher car j’avais défini la raison d’être et les valeurs d’une association que j’avais créée, et cela leur a semblé pertinent dans leur contexte. J’avais donc filé un coup de main à trois personnes qui avaient perçu l’intérêt de la démarche. Trois personnes de mon réseau qui plus est. J’avais adoré ces trois accompagnements et les porteurs de projets avaient fait preuve de beaucoup d’enthousiasme. J’avais un format qui me plaisait, qui semblait avoir l’impact que je voulais avoir et qui plaisait aux participants. Je me suis donc mis à l’envisager comme une offre.
Cependant, transformer un service en une offre revenait dans mon cas à passer d’une dynamique dans laquelle on venait me chercher à une démarche dans laquelle je propose quelque chose. Le fait de le construire en offre revenait à dire que je prétendais pouvoir le faire. Ce changement a créé un vrai syndrome d’imposteur chez moi. Je l’avais fait pour trois projets, mais je n’étais pas sûr que ce soit pertinent pour tout le monde. Ce syndrome d’imposteur était lié au fait que, sans le savoir, je n’étais pas vraiment aligné avec ma valeur d’honnêteté intellectuelle.
Pourtant, j’avais vraiment envie de pouvoir continuer ces accompagnements, alors je me suis dit que j’allais le proposer, mais que pour lancer mon offre j’allais proposer ces accompagnements en prix libre. Je me disais que si les gens fixaient eux même le prix après la prestation, alors ils ne pourraient pas dire que ça ne le valait pas ! C’était une manière de m’assurer que je ne romprais jamais la confiance qu’on m’accordait. D’un coup, cela me faisait beaucoup moins peur de proposer mes accompagnements, ça ne me figeait plus et je trouvais même cela rassurant et confortable. Finalement, c’était pour moi la manière la plus facile de proposer mon offre.
Alors, ça vous apparaît toujours courageux le prix libre ?
Aujourd’hui j’ai fait de nombreux accompagnements dans des contextes différents et avec des projets et des équipes variés. J’ai construit beaucoup plus d’assurance face à mon offre et je vois l’impact que j’ai. Le prix libre fonctionne plutôt bien, alors au moment où je me suis posé la question, j’ai choisi de continuer à fonctionner de cette manière. Je m’étais dit que, en rendant mon offre accessible à tous, cela me permettait d’être plus inclusif. En creusant un peu plus je me rends compte que c’était une nouvelle fois la décision la plus facile pour moi.
Dans tout ce que je fais, je pars de la conviction que les êtres humains sont bons. Du coup je suis convaincu que si chacun se (ré)aligne avec ses valeurs, ses convictions et ses aspirations alors il fera des choses positives. Je cherche donc à accompagner les individus, qu’ils soient seuls ou en groupe dans le cadre d’une équipe, à incarner ce qu’ils ont envie d’incarner. Mes deux portes d’entrées sont souvent la raison d’être du projet et les valeurs de l’équipe.
J’ai construit une méthodologie en laquelle j’ai confiance et que je continue à alimenter et à améliorer régulièrement. Les retours sont enthousiastes et très cohérents par rapport à l’impact que je cherche à avoir. Je suis maintenant convaincu de l’apport. Je le vois lorsque j’anime les ateliers, j’ai des témoignages qui le disent et j’ai des éléments tangibles pour le vérifier.
Pour autant, je sais aussi que tout le monde n’est pas réceptif de la même manière. Le contexte dans lequel j’interviens, la situation du moment, la personnalité, le caractère et l’histoire de mon interlocuteur sont autant de critères qui font que mon intervention est plus ou moins pertinente. Ainsi, je suis convaincu que l’impact et la valeur de ce que je fais dépendent de moi, mais aussi de la personne en face de moi. En étant donc très honnête envers moi-même, je sais que si je fixe un prix, ce ne sera pas représentatif de la valeur de la plupart de mes accompagnements : des fois ce sera plus et des fois ce sera moins. Finalement, m’imaginer fixer un prix aujourd’hui créé plus d’inconfort qu’autre chose chez moi. En fait, j’ai une nouvelle fois choisi la facilité ! Le courage, ça aurait été de ne pas le faire.
Encore une fois, l’idée de cet article n’est pas de parler du prix libre, de qui devrait le mettre en place ni pourquoi, quand où comment. Pour ma part, je le fais aujourd’hui, dans un contexte bien particulier et je ne sais pas si je continuerai toujours à le faire. Loin de moi l’envie de juger qui doit le faire ou non. Par contre, ce que je veux vraiment illustrer ici c’est que cette prise de décision était tout sauf un acte de courage pour moi. Je défini souvent les valeurs en disant qu’elles forment une sorte de boussole personnelle qui nous guide dans nos choix et nos comportements. Au moment de prendre la décision du prix libre, je ne l’ai pas fait en réfléchissant à mes valeurs, mais plutôt en cherchant la solution qui m’apparaissait la plus facile. Il y avait un coté instinctif. C’est seulement en faisant une analyse rétrospective que je suis maintenant convaincu que ce sont mes valeurs qui m’ont guidé, que j’arrive à le comprendre et l’expliquer.
La prochaine fois que quelqu’un vous dit que c’est osé ou courageux de faire ce que vous faites et que cette idée ne résonne pas chez vous, pensez à cette réflexion.
Dites-vous que vous ne mobilisez peut-être simplement pas les mêmes valeurs que votre interlocuteur dans cette situation-là.
Vous pouvez même pousser un peu l’analyse pour essayer de comprendre quelles valeurs vous incarnez à ce moment-là.
Allez courage, c’est pas si dur d’être aligné avec ses valeurs ;)