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title: Quelle est la meilleure réponse à l’ubérisation ? Les collectifs ! url: http://www.internetactu.net/2016/04/04/quelle-est-la-meilleure-reponse-a-luberisation-les-collectifs/ hash_url: 09e4f7f29f

Les algorithmes sont devenus nos nouveaux patrons, nos nouveaux collègues de travail, non sans créer de nouvelles tensions dans les rapports de travail

On peut s’en prendre aux algorithmes ou aux limites de l’économie collaborative (voire notre dossier). Mais sont-ils les seuls en cause ? Aux récents Etats généraux de la révolution numérique, Noémie de Grenier, de la coopérative d’activité Coopaname, rappelait que pour répondre à l’individualisation de la société que nous proposent les entreprises algorithmiques – les entreprises du travail à la demande comme Uber ou Take eat easy, ces entreprises de la Gig Economy, cette économie des petits boulots -, il existe déjà des réponses basées sur la solidarité.

L’économie sociale a donné naissance aux syndicats, aux associations et aux formes coopératives. Se rassembler pour se protéger les uns les autres est depuis longtemps une aspiration de la société. En Belgique, où le statut d’autoentrepreneur n’existe pas, expliquait-elle, les aspirants coursiers de Take eat Easy ont du s’inscrire chez SMart, une coopérative pour obtenir un statut leur permettant de travailler d’une manière indépendante. Face à ce soudain afflux de nouveaux indépendants, SMart a pu plus facilement les identifier et leur permettre de se coordonner les uns avec les autres, explique également le journal belge Le Vif dans le dossier qu’il consacre au problème. Après avoir aidé les coopérateurs à prendre la mesure des mauvaises conditions de rémunération qu’offrait Take eat Easy, la coopérative a lancé une convention-cadre pour aider les coopérateurs souhaitant travailler avec ce type de plateformes, visant à imposer des conditions de travail décentes (salaire horaire minimum avec un montant de base garantie par soirées, comprenant les temps d’attente, ainsi que des obligations en matière d’assurance ou d’équipement…).

En fait, rappellait Noémie de Grenier, pour se prémunir des risques d’auto-exploitation, l’organisation collective reste la meilleure réponse. Si la coopérative se défend d’être l’unique solution à l’ubérisation, Noémie de Grenier souligne que “l’individualisation induit toujours de la précarité”. Le travail isolé et précaire n’est jamais émancipateur. Bien des auto-entrepreneurs travaillent en-deçà du Smic, même après plusieurs années sous ce régime.

Comme le remarquait Diana Filippova du collectif Ouishare qui intervenait à ce même événement, l’ubérisation est la partie visible de la transformation des modes de travail. Le problème aujourd’hui est que le chômage de masse signe la fin du salariat. Les compensations à la relation de subordination qu’étaient la sécurité sociale, la garantie de salaire, l’intégration au monde social, l’accès à des possibilités de crédits basés sur le CDI… disparaissent. Le salariat ne représente plus l’avenir. 2/3 des diplômés souhaitent créer leur structure, décider eux-mêmes de leur propre activité. Ils veulent de l’autonomie : déterminer leur activité. Cette autonomie va de pair avec la montée des inégalités et la remise en question des solidarités qui existaient à l’époque du CDI.

Ces dégradations qui affectent pour l’instant les zones grises de l’emploi, notamment les travailleurs atypiques que sont les pigistes, les intermittents, les auto-entrepreneurs… nécessitent des réponses qui ne soient pas seulement celles de l’individualisation, celles du tous entrepreneurs qui conduit les gens à sortir des cadres du code du travail, rappellait Noémie de Grenier. Or pour rééquilibrer le rapport de force, il faut des réseaux d’entraides, des plateformes collaboratives, des formes coopératives… qui permettent de reconstruire des formes de solidarités. Les droits des chômeurs, des salariés, des indépendants se dégradent d’autant plus que ces gens sont isolés. Pour elle, cette question de l’autonomie n’est pas tant celle du statut des travailleurs que celle des conditions de travail.

Il y a un enjeu à structurer des collectifs de travailleurs autonomes, comme souhaite l’adresser Bigre!, ce grand rassemblement de coopérateurs en cours de conception. Si l’enjeu de demain est de répondre aux questions qu’adresse le développement du travail non salarié, la réponse semble plus à trouver du côté de l’organisation de nouvelles formes de collectifs et de solidarité que de la promotion de la seule indépendance. L’enjeu n’est alors par seulement de créer des plateformes réellement coopératives que de démultiplier les formes coopératives et collaboratives plutôt que des formes d’entrepreneuriat individualisantes.

Hubert Guillaud